
Aujourd’hui, quand je me lève Francesca revient de 40 minutes de course à pied. A une époque elle courait trois fois par semaine durant 1h30 autour du lac de Varese mais avec le Covid19, elle a perdu le rythme. Elle se sent très bien après cet effort, cela me donne envie de me remettre à courir. Elle vient d’arriver, elle est bien rouge et très satisfaite d’avoir couru. Elle me semble tellement équilibrée, alignée avec elle-même et bien dans sa peau cette Francesca, c’est fou !
Nous prenons le petit-déjeuner ensemble, c’est agréable. On parle de plein de choses, Renato et Paula sont aussi présents au coin du feu. Je découvre d’ailleurs la crème de pistache sur mes tartines, c’est super bon.
En parlant de petit déjeuner, je vous ai parlé de toute la chorégraphie autour des nappes ici ? Il y a une sorte de cérémoniale à chaque fois qu’on utilise la table de la cuisine. Soit on enlève la nappe, soit on la met, soit il ne faut rien mettre dessus, soit c’est bon on peut mettre quelque chose dessus. Je n’ai pas tout compris. Chez moi, je ne mets pas de nappe et je n’ai plus de grands-parents depuis bien longtemps (j’ai souvenir qu’ils mettaient des nappes) alors j’ai perdu le fil. En tous cas, j’ai compris qu’après chaque repas, on la met en bouchon pour jeter les miettes dehors et que le matin on met des sets de tables par-dessus la nappe. Mais attention, pas de set de table pour le déjeuner et le diner, malheur à vous si vous vous trompez. Le midi et le soir, on a des serviettes en tissus dans des ronds de serviette (comme quand j’étais enfant !). Et puisqu’on parle de nourriture, j’ai l’impression de manger lentement ici ! C’est rigolo car en général quand ils ont fini, moi je ne suis qu’à la moitié de mon assiette alors ils me regardent manger et me disent de prendre mon temps. C’est mignon. Je crois que c’est aussi parce que j’ai toujours un truc à raconter et que je parle beaucoup… ! Chuuuuut.
Durant le petit déjeuner, j’apprends que leur grand-mère ne viendra pas au repas de l’épiphanie ce midi, elle est âgée et ne se sent pas très bien aujourd’hui. C’est dommage, je ne la verrai pas… mais il vaut mieux qu’elle se repose. Alessandro descend aussi et ouvre directement le réfrigérateur pour prendre un chameau de l’épiphanie à la pâte à choux. Il se fait gronder une fois qu’il en a mangé une bonne partie.
Dans la pièce, nous sommes entourés par les deux rois de la maison, les chiens ! C’est eux qui ont le droit de s’installer sur les deux sièges les plus confortables et moelleux de la cuisine. Ils sont chéris par leur maîtres, et moi je suis contente car j’aime la vie avec des chiens. C’est l’excitation et la joie en continu avec eux. Ceux-là sont particulièrement gentils, câlins et jaloux l’un de l’autre. Ils rentrent, ils sortent, ils ouvrent les portes… je vous le dis, ce sont les rois de la maison !


Ce matin, Paula a pris le temps de m’imprimer des comptines sur la befana et elle me les lit. Ensuite, j’ai le temps de me poser quelques minutes dans le séjour pour écrire.

Rapidement, Paula me propose de cuisiner le repas de l’épiphanie, on cuisine des « pizzoccheri ». Ce sont en fait des pâtes complètes, mélangées à du chou, des pommes de terre, deux sortes de fromages coupés en morceaux (type comté) et une autres sorte de fromage mixé. Une fois mixé, on dirait de la farine de fromage.
Paula me donne le chou, j’ai ordre de couper les feuilles et de couper le fromage en cubes. Elle s’occupera de tout le reste. Pendant ce temps, Francesca s’attèle au dressage de la table dans le séjour. Et oui, c’est l’épiphanie, ce n’est pas un repas comme les autres !


C’est joli, Francesca a mis une nappe à carreaux bleus assortie aux serviettes. Chacune des serviettes est entourée d’un collier de perles de culture tout comme la bouteille. C’est prêt, nous nous mettons à table. La mamie de Francesca n’étant pas venue, nous sommes entre nous pour manger ce bon pizzoccheri. Je pense que c’est le meilleur plat de mon séjour, il me semble être composé à 50% de fromage et à 50% du reste. J’ai bien l’impression que le vert du chou fait son apparition dans l’assiette pour nous rassurer au milieu de tout le fromage fondu et des pâtes.




Dans nos assiettes, ce n’est pas les pommes de terre que vous voyez principalement, mais surtout des morceaux de fromage!
Après le repas, un ami de la famille est venu pour le café. C’est l’heure de l’expresso, la fameuse petite gorgée de café après chaque déjeuner. Leur ami s’appelle Giacinto, il vit dans le même village. Il parle français car avec une femme et un fils français, ils ne parlent que français à la maison. Donc, il n’a jamais vécu en France mais il le parle vraiment très bien. C’était drôle cette petite heure en sa compagnie car je parlais un peu en français avec Giacinto parfois, et toute la famille comprenait quand même. Comme quoi, nos langues sont vraiment très proches ! En plus, dans cette partie du pays, beaucoup de personnes parlent le français, ont des racines françaises ou de la famille française.
Nous parlons de la raclette. Dimanche avec ma famille, nous serons 18 pour justement manger le fromage fondu sur le fromage et les pommes de terre. Ça les impressionne une raclette avec autant de personnes (et moi aussi). Ils en font aussi, une ou deux chaque hiver. C’était d’ailleurs leur repas du nouvel an ! On en échange car ils veulent être sûrs de faire comme les français, alors j’explique tout bien! Spoiler alert, ils font exactement comme nous ! 😉
Le repas est terminé, la table est débarrassée, Giacinto est parti. Francesca m’explique l’histoire de cette maison, de sa famille et son enfance. Je découvre la manière dont la maison a évolué, a été agrandie et les personnes qui s’y sont succédés. Ensuite, partons faire le tour du village, c’est l’occasion de m’immiscer au coeur de la vie de sa famille, de ses ancêtres. Sa famille fait partie des plus grandes et les plus implantées du village. A chaque lieu par lequel nous passons, Francesca a un souvenir à raconter.
Nous passons par plein de petites ruelles, l’église, le terrain de foot (vu sur le lac de Varese en contre bas), des maisons, pour finir par le cimetière. Le village où elle a grandi est tout petit, elle connait beaucoup de monde. Nous finissons par le cimetière où nous restons un bon moment pour venir voir ses ancêtres. Les tombes sont comme les nôtres, la seule petite différence c’est que beaucoup d’entre elles ont une « flamme éternelle », comme une lumière qui brille en continu sur chaque tombe.
Elle m’a tellement partagé, c’était passionnant ! J’ai vraiment adoré ce moment où j’ai pu m’imprégner de sa vie, de son passé tout en sachant ce qu’elle est devenue. Avec mon regard d’inconnu, cela nous a invité à faire quelques liens entre son enfance où la famille a eu une grande place et sa vie d’aujourd’hui si singulière.
Concernant la maison, elle m’a raconté que c’est une maison de famille qui appartenait à ses grands-parents. Deux maisons accolées ont été construites pour que différents membres de la famille vivent ensemble. Aujourd’hui, c’est la famille de Francesca qui occupe ces deux maisons. Durant la première vague du Covid19 sa région a été très durement touchée par le virus. Cette période a été terrible pour la région de Milan et la famille a été marquée par cette période. Mais la configuration des maisons jumelles a été très pratique :
En février 2020, Francesca était en mission au Bangladesh et est rentrée fin février quand l’épidémie du Covid19 a commencé à flamber en Italie du nord. L’Italie était confiné et elle s’est engagée dans la protection civile en renfort. La maison était conçue de façon à ce qu’ils puissent s’isoler des autres en cas de contamination. Vu que tout est en double, une personne pouvait rester seule, dans une partie de la maison, avec toutes les commodités. A ce moment-là, ils l’ont tous eu les uns après les autres, à des degrés plus ou moins graves.

Après cette belle balade sous le ciel grisonnant, nous sommes rentrées. Renato me propose qu’on aille s’occuper des animaux. Allez hop, nous nous en allons déplacer les ânes d’un enclos à un autre. Polone est toujours aussi excitée et sa maman toujours aussi mignonne. Ils sont tout doux, surtout leurs grandes oreilles. Renato leur donne des grosses fourches bien remplies de paille. Il fait nuit, j’éclaire Renato qui travaille à la lampe torche. Ensuite, nous nous en allons voir les vaches, c’est au leur de manger pour elle. Renato me parle vite en italien, des fois c’est pour me dire ce que je dois faire, mais je ne comprends rien. Bon, nous n’avons pas fini mangé par les vaches donc ça va, j’ai pas du faire trop de bêtises.
En rentrant, Francesca m’a expliqué son métier et sa vie au Kenya. Francesca est une bonne oratrice. Elle marque des temps de pause, elle sait capter son auditoire. Elle est pédagogie, prend le temps d’expliquer les choses pour bien comprendre et elle s’intéresse à beaucoup de choses. Elle se pose beaucoup de questions…. elle a envie de tout comprendre. J’aime bien parler avec elle ! Je n’ai pas hésité à poser les questions qui me venaient à l’esprit pour bien tout comprendre de sa vie là-bas. Nous avons de nouveau parlé peut-être une ou deux heures dans la cuisine. Puis je réalise que c’est mon dernier soir dans cette famille et que je dois préparer mes affaires mais surtout préparer le cadeau pour la famille. Heureusement, on mange un peu tard ce soir, j’ai pu prendre le temps de préparer ma surprise.

A taaaaable, Paula nous sert une quiche ce soir, très bonne aussi. Je viens à table avec mon petit sac avec les cadeaux à l’intérieur. Je trépigne d’impatience de les offrir. Ca y est, c’est le dessert, c’est le moment ! J’offre deux tablettes de chocolats artisanales, fabriquées près de chez nous en France. Ils sont contents. On mange le dessert puis, je patiente et j’offre mon second cadeau…. SUPRIIIIIISE ! Un album photo ! Durant tout le séjour, j’ai pris avec mon Polaroid des photos des moments importants. J’avais envie qu’une trace reste de notre rencontre. J’avais emmené un album vierge, de quoi le décorer, et de quoi toutes les coller à l’intérieur le dernier jour ! Ils sont tellement enchantés de découvrir cet album, ils tournent les pages les yeux grands ouverts ! Je suis contente de moi, car ça leur fait vraiment plaisir.

Après tout ça, nous allons nous coucher, demain RDV à 9h dans la cuisine pour le petit déjeuner. Nous devons être à 10h30 à l’aéroport !
En allant me coucher, je repense à Renato qui n’aime pas quand je prends des Photos mais qui était content tout à l’heure d’avoir ce souvenir entre les mains ! Il avait un énorme sourire en regardant l’album et a regardé de près ce que j’ai fait. Il a dit plusieurs fois que c’est un beau geste ! (Il a aussi dit ce midi que je lui posais trop de questions ahahah Quoi, moi je pose trop de questions ??)
Allez, bonne nuit !