
Aujourd’hui, c’est mercredi, c’est la fin des vacances pour la petite sœur d’Elodie ! Ce matin, elle doit être à l’heure pour prendre son car alors nous faisons un petit tour à la « gare routière » de Ioannina pour la déposer.
Je suis super contente car nous allons dormir sur la plage ce soir avec toute l’équipe d’Habibi.works, nous serons neuf. L’équipe est fatiguée, ils ne sont pas assez pour gérer toute la structure. Le jeudi c’est leur journée travaille de groupe, et prises de décision concernant l’association. Vu qu’on dort sur la plage, ils feront leurs réunions surplace demain. Rappelons qu’il s’agit de bénévoles en général présents au moins 3 mois !
Ce matin, je rencontre une jeune femme qui a 23 ans et venant de Somalie. Je découvre une personne qui adore les langues étrangères. Elle parle le somali et l’arabe puisque ce sont les deux langues de son pays. Elle a appris aussi le turc, et je trouve ça fort car elle a appris cette langue grâce à Youtube. Juste avant notre rencontre, je l’ai vu discuté en turc avec d’autres personnes. Beaucoup de personnes parlent turc ici, c’est comme une langue de référence j’ai l’impression. Même si ce n’est pas la langue de leur pays, les gens ont l’air de le parler un peu quand même. Donc, pour revenir à cette jeune femme, ce n’était pas prévu mais cette langue lui ait bien utile. En ce moment, elle est également en train d’apprendre l’allemand car elle aimerait y vivre. En connaissant la langue, cela lui permettrait de s’intégrer plus facilement, de lui faciliter son quotidien là-bas.
Après cette rencontre, je retrouve Elodie. Nous avons dû résoudre le problème de mon retour car il n’y a pas de cas vendredi matin pour retourner au port. C’est Vendredi Saint ici (plus tard que chez nous en France) ! Mon avion retour est de Corfou donc je devais reprendre le car pour rejoindre le port puis prendre le bateau pour rejoindre l’île et enfin prendre l’avion. Pas de car, pas de train, pas de possibilité de rejoindre le port, panique à bord ! Pour remplacer le car, nous décidons de louer une voiture et que ce soit Elodie qui m’emmène. Ouf, merci Elodie !
L’après-midi à Habibi.works a été super sympa et riche de nombreuses rencontres : nous faisons la réception avec Elodie. Il y a toujours une personne qui est à la réception de l’association aux horaires d’ouverture. C’est le cœur de l’organisation puisque tout le monde passe par là pour rentrer, prendre rendez-vous pour un rendez-vous, indiquer qu’il vient pour un atelier…. Etc.
Cet après-midi, il fait un très grand soleil ! Nous avons mis la table dehors sur la terrasse au soleil, l’ordinateur et nos deux chaises. Elodie a aussi ouvert le petit truck où les gens peuvent se servir du thé s’ils ont envie. Bon, il n’y a pas grand monde qui se sert puisque c’est le ramadan en ce moment. Ils n’ont donc pas le droit de manger ou de boire jusqu’au coucher du soleil. Beaucoup de personnes viennent sur rendez-vous à l’atelier réparation de vélo et à l’atelier couture ou alors ils empruntent un vélo. C’est marrant, c’est intense, c’est vivant. Elodie est très sollicitée entre les vélos que les gens viennent rendre, d’autres viennent emprunter, un enfant qui veut du sucre, un autre qui négocie pour avoir un rendez-vous vélo ou couture alors qu’il n’en a pas pris…J’ai pu échanger avec pas mal de personnes venant de nombreux pays différents : Soudan, Somalie, Ethiopie, Oman, Afghanistan… Certains restent dans le canapé extérieur à discuter, à flâner, certains attendaient Elodie, certains veulent aller aux activités sportives, certains se baladent dans la cour, le potager. Nous avons eu du passage tout l’après-midi, en continu. Il n’y a jamais eu de moment sans interaction avec quelqu’un. On est restées par exemple un moment avec un monsieur qui veut construire quelque chose en bois mais qui prend du temps et l’atelier bois est fermé depuis hier. Nik qui était le bénévole en charge de cet atelier est parti pour 15 jours. On a beaucoup ri car le monsieur ne parle pas l’anglais alors on n’arrivait pas à comprendre. On a demandé à une autre personne pensante qu’il parle sa langue pour nous aider et nous traduire en anglais. Au final, il utilisait les gestes comme nous ! Ca nous a fait rire ! Beaucoup de personnes ne maitrisent pas l’anglais, et chaque personne parlant la langue de son pays, c’est souvent les gestes ou google traduction qui nous rendaient bien service pour échanger. Ou par chance, quelqu’un qui passe par là parlant la même langue qui nous traduit !


Je vois aussi plusieurs enfants plutôt petits, ils jouent ensemble, ils viennent avec leur maman ou leur mamie jusqu’à l’association. Ça me fait drôle de me dire que ces enfants sont eux aussi coincés ici pour des années. Ils ont 3 4 ou 5 ans et ils vont passer 3 à 4 ans de leur vie dans ce camp avec leur famille dans l’incertitude de leur avenir. Une chose est sûre, on ne nait pas tous avec la même chance… Là c’est mercredi mais pour les autres jours je ne sais pas s’ils vont à l’école, j’espère qu’ils y ont droit.
J’ai aussi rencontré Eyoub cet après-midi. Il est d’Ethiopie et il est circassien. Il m’a montré des vidéos de lui dans son pays pendant des spectacles dans un cirque, il a un vrai talent. Ce n’est plus possible pour lui actuellement d’exercer son métier. Je lui ai demandé si, s’il obtient sa demande d’asile, s’il souhaite continuer dans le cirque en Europe. Il m’a dit que s’il l’obtient, il veut surtout gagner un peu d’argent pour s’acheter déjà le minimum vital comme des vêtements. Et après, il verra si cela est possible mais poursuivre dans le cirque parait être un rêve lointain aujourd’hui pour lui…

J’ai aussi rencontré Reza qui adore venir à Habibi.works, c’est sa seconde famille. Il travaille dans l’usine de poulet le matin, puis il vient l’après-midi à Habibi pour animer un atelier. Il est très investi dans l’association. Les personnes du camp ont la possibilité de faire partie de l’équipe et d’animer des ateliers. Ils participent aussi au fonctionnement de l’association, aux réunions d’équipes, etc. Cela permet une intégration sociale, professionnelle, de motiver, d’avoir des objectifs, des projets !
Après tout cela, à 17h45, comme chaque jour c’est le même rituel : on met la musique forte ! C’est signe que les ateliers s’arrêtent et que tout le monde doit aider à ranger et faire le ménage.
Elodie n’a pas arrêté de l’après-midi et est encore dans l’action et fatiguée. Nous avons fermé l’association pour aujourd’hui et demain. Nous nous préparons pour partir à la mer pour y passer la soirée. Nous faisons nos sacs et prenons nos affaires pour dormir sur la plage (sac de couchage, matelas de yoga, pulls, serviette, couvertures…).



La route a duré 1h, nous sommes allés vers Igoumenitsa (là où je prendrai le bateau vendredi, après-demain !). C’était super la route, j’avais l’impression de partir en vacances ! L’équipe était super heureuse de pouvoir se retrouver, s’échapper un peu et décompresser.
En arrivant, vers 20h, le soleil se couchait, c’était magnifique. On s’est installées sur une plage paradisiaque pour la nuit. On a rassemblé du bois pour faire un feu et on s’est mis tout autour pour discuter, faire des jeux et manger. On s’est endormis sous les étoiles avec le feu qui crépite et le bruit des vagues. C’était magnifique. J’ai adoré cette soirée et cette nuit où je ressentais à la fois chaud dans mon duvet et le froid de l’extérieur sur mon visage. Dès que j’ouvrais les yeux, je voyais le spectacle immense des étoiles au-dessus de ma tête. C’est magique.







